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Les États-Unis se disent « pleinement engagés » en Afrique

Analyse

Cette semaine dans Ondes de Choc : les États-Unis déroulent le tapis rouge pour les dirigeants africains, le Ghana commence la restructuration de sa dette et (de nouvelles) accusations d’incitation à la haine en ligne contre Facebook.

ACTUALITES

Tapis rouge : Cette semaine, les États-Unis ont déroulé le tapis rouge pour accueillir les délégations de 49 pays africains et 45 chefs d’Etat à l’occasion du deuxième sommet États-Unis/Afrique. L’engagement des dirigeants américains auprès des pays africains a été plutôt modéré au cours des dernières années. Jusqu’à présent, la seule visite du président Joe Biden dans un pays africain a été une brève escale lors de la COP27 en Egypte en novembre. Son prédécesseur, Donald Trump, n’avait effectué aucune visite dans les pays africains, qu’il a honteusement qualifiés de « pays de merde ». Les États-Unis ont discrètement  continué à investir massivement en Afrique à travers des projets de développement. Pourtant, leur engagement envers le continent a été moins cohérent, moins collaboratif et moins ciblé que celui de la Chine par exemple. Alors que le commerce entre les États-Unis et l’Afrique a triplé depuis 2002, passant de 21 à 64 milliards de dollars, le commerce entre la Chine et l’Afrique s’est envolé, passant de 12 à 254 milliards de dollars. Les investissements directs à l’étranger des États-Unis en Afrique ont chuté de 36 % depuis le premier sommet États-Unis/Afrique en 2014. On a quand même une bonne nouvelle pour vous : le président Biden a annoncé qu’il soutiendrait l’adhésion de l’Union africaine au sommet du G20. 🥳

Choses anciennes, choses nouvelles : Lors du sommet, le président Biden a déclaré que les États-Unis sont « pleinement engagés » en Afrique. Le pays a annoncé son intention d’investir 55 milliards de dollars sur le continent au cours des trois prochaines années, y compris 1,33 milliard de dollars par an de 2022 à 2024 pour la formation du personnel de santé. Des engagements réciproques en matière de commerce et d’investissement, des accords et des partenariats d’un montant de 15 milliards de dollars ont également été annoncés. Les États-Unis se sont engagés à travailler avec les pays africains sur la transition climatique et énergétique. Cela comprend l’électrification de 10 000 établissements de santé en Afrique subsaharienne, des investissements de plus de 180 millions de dollars dans les énergies renouvelables et le soutien de projets de transition énergétique au Kenya, au Malawi, au Mozambique et au Nigeria. Ces nouvelles annonces  présentées par les États-Unis vont dans le bon sens, mais il y a également beaucoup d’engagements pré-existants comptabilisés dans ces annonces, un phénomène fréquent lors d’événements de haut niveau (voir par exemple le cas de l’initiative Global Gateway de l’UE).  

Une idée formidable : La dernière étude de ONE montre comment les banques multilatérales de développement pourraient prêter jusqu’à 1 000 milliards de dollars supplémentaires pour aider les pays à financer leurs objectifs de développement. Les banques de développement pourraient le faire sans financement supplémentaire de leurs actionnaires. Elles peuvent (et devraient, selon nous) prendre des mesures pour utiliser leur capital plus efficacement.  Cela implique une meilleure utilisation de leurs ressources existantes afin d’augmenter leur capacité de prêt, comme par exemple  la meilleure prise en compte du « capital exigible », une garantie proposée aux actionnaires si les banques ont des difficultés à honorer leurs dettes. Ces fonds pourraient permettre aux pays de mieux faire face à certains des défis les plus urgents – et les plus coûteux – du monde, y compris le changement climatique. C’est une situation gagnant-gagnant à un moment où nous aurions tous besoin de bonnes nouvelles. 

 

Passons un accord : Le Ghana a obtenu du FMI un accord provisoire de restructuration de sa dette de 3 milliards de dollars. Le pays est au bord du défaut de paiement et sa devise a enregistré la pire performance au monde cette année. L’accord constitue une étape essentielle pour rendre la dette galopante du Ghana plus viable, mais les hauts fonctionnaires du FMI doivent encore donner leur accord. Ces derniers attendent du Ghana qu’il conclut des accords de restructuration avec le secteur privé et les créanciers étrangers (ce qui n’est pas une mince affaire). Pendant ce temps, l’endettement des pays à revenu faible a plus que doublé au cours de la dernière décennie. Si seulement il existait un mécanisme international qui – s’il est mis en œuvre par toutes les parties prenantes – pourrait aider à résoudre la crise de la dette en plein essor {comme par exemple, le « Cadre commun » 👀}.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais : Le président ougandais Yoweri Museveni s’est insurgé contre la politique deux poids, deux mesures traitement inégal de l’Europe en matière de climat et de transition énergétique. L’Union européenne a en effet annoncé de nouveaux investissements dans les énergies fossiles, deux mois après que son parlement a interrompu l’avancement du projet controversé d’oléoduc de pétrole brut est-africain de l’Ouganda. Les récentes décisions du Royaume-Uni d’ouvrir une nouvelle mine de charbon et des États-Unis d’augmenter leurs exportations de gaz naturel liquéfié ont suscité des critiques similaires de la part de la société civile africaine et des experts du climat. 

Une victoire à la Pyrrhus : Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a évité une procédure de destitution suite au vol de monnaies étrangères non déclarées lors d’un cambriolage. Il a profité d’avoir la majorité parlementaire, qui a voté en bloc contre la procédure. Ramaphosa a certes évité une procédure de destitution, mais il restera sous surveillance, la Cour constitutionnelle, la protection de l’État et la Banque centrale du pays poursuivant leurs propres enquêtes. Ayant pu éviter de rendre des comptes aux membres de son parti, dont beaucoup sont confrontés à leurs propres scandales de corruption, il ne sera pas facile pour Ramaphosa de conserver la position morale grâce à laquelle il s’est jusqu’à présent attaqué à la corruption au sein du gouvernement.

La place d’une femme : Au parlement nigérian, seuls quatre députés sur 100 sont des femmes, malgré une législation nationale qui appelle à la parité.👀 De telles lois ne sont que symboliques si des comptes ne sont pas rendus au plus haut niveau et si des efforts significatifs ne sont pas déployés pour lutter contre les préjugés sexistes qui sous-tendent l’exclusion des femmes. Le Sénégal en est un exemple : malgré une proportion de femmes de 43,6 % au parlement national, il a été révélé que des personnalités de haut rang faisaient partie d’un groupe ouvertement misogyne sur Facebook et de l’agression d’une parlementaire par deux collègues masculins.

Méta-violence : La société Meta (née Facebook) fait face à la plainte d’une ONG et de deux particuliers au Kenya, accusant son algorithme d’avoir contribué à la propagation de la haine en ligne et à l’incitation à la violence pendant la guerre civile éthiopienne. Les plaignants demandent à Facebook d’améliorer la modération de son contenu et de créer un fonds de 2 milliards de dollars pour les victimes éthiopiennes de violences provoquées par des messages publiés sur la plateforme. On estime que 500 000 personnes sont mortes dans le conflit entre l’Éthiopie et le Tigre avant que les parties ne concluent un accord de paix le mois dernier. Des millions d’autres personnes ont été déplacées et contraintes de fuir le pays, avec des conséquences mortelles pour certains migrants. 

L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION : 

  • Notre podcast avec Laurence Fischer, triple championne du monde de karaté et ambassadrice pour le sport est à écouter ici !  
  • Clap de fin pour nos jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices : samedi dernier, nos bénévoles ont participé à un atelier fresque du climat animé par la Fondation GoodPlanet puis ont célébré leur mobilisation en 2022. Merci à elles et eux pour leur mobilisation cette année
  • Retrouvez la tribune de la directrice de ONE en France,  Najat Vallaud-Belkacem, dans Le Grand Continent sur la question de la transparence financière : Protéger la démocratie contre l’opacité financière.
  • L’appel à candidatures pour rejoindre la promotion 2023 des jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices est étendu jusqu’au 2 janvier : rejoignez-nous
  • Que sont les banques multilatérales de développement, comment fonctionnent-elles et comment peuvent-elles s’améliorer ? Découvrez-le dans notre dernière visualisation de données ici

LES CHIFFRES :

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