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La faim est un problème récurrent

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Cette semaine dans Ondes de Choc : Nous examinons de plus près les causes de l’insécurité alimentaire en Afrique et les solutions pour y remédier.

ACTUALITES

La lutte pour se nourrir : Nous sommes au cœur d’une crise alimentaire internationale. Plus de 800 millions de personnes dans le monde – dont près de 300 millions en Afrique – ne mangent pas à leur faim. Les pays d’Afrique de l’Est, d’Afrique de l’Ouest et du Sahel sont ceux où le nombre de personnes confrontées aux trois niveaux d’insécurité alimentaire a le plus augmenté en 2021 et 2022. La hausse des prix des denrées alimentaires, le changement climatique, les conflits et le coût élevé des engrais sont les principaux facteurs qui y contribuent. En Afrique, la dépendance aux importations alimentaires est également responsable. Bien que le continent ait non seulement le potentiel de nourrir sa population mais aussi le monde entier, on estime qu’il dépense chaque année 75 milliards de dollars pour importer plus de 100 millions de tonnes de céréales.

Une pratique ciblée : La recherche de moyens pour établir la souveraineté alimentaire de l’Afrique figurait en tête de l’ordre du jour du sommet de Dakar II, qui s’est tenu la semaine dernière au Sénégal. Dans son discours d’ouverture, Macky Sall, président du Sénégal et de l’Union africaine (UA), a exhorté l’Afrique à « apprendre à se nourrir elle-même » et a demandé aux pays de consacrer au moins 10 % de leur budget national à l’agriculture. Si cette formulation vous semble familière, c’est normal. Les dirigeants africains se sont mis d’accord sur cet objectif de 10 % des dépenses il y a 20 ans dans la déclaration de Maputo, et l’ont réaffirmé en 2014 dans la déclaration de Malabo. Pourtant, en 2023, un seul pays – le Rwanda – est en passe d’atteindre cet objectif d’ici 2025. Les dirigeants africains joindront-ils cette fois-ci l’acte à la parole ? Désiré Assogbavi de ONE, qui a participé au sommet, a déclaré qu’il avait ressenti un sentiment d’urgence qui n’était pas présent lors de précédents événements de haut niveau. 1,3 milliard d’Africains comptent là-dessus.

Guerre des prix : La guerre que mène la Russie en Ukraine depuis près d’un an a déstabilisé l’approvisionnement mondial en céréales et en engrais. Avant la guerre, la Russie et l’Ukraine fournissaient environ 50 % des importations de blé de l’Afrique. L’Ukraine approvisionnait la moitié du blé que le Programme alimentaire mondial distribuait lors des crises humanitaires, dont une grande partie aux pays africains. L’invasion a entraîné une pénurie d’au moins 30 millions de tonnes de nourriture dans toute l’Afrique et une flambée importante des prix des céréales, plongeant 75,8 millions de personnes supplémentaires dans l’insécurité alimentaire et provoquant une augmentation de l’indice des prix alimentaires de 34 %. Bien que ce dernier ait à nouveau diminué, il reste supérieur de 39 % au niveau des prix de mars 2020, soit au début de la pandémie.

La famine rencontre l’inflation : Le taux d’inflation moyen en Afrique était de 10,3 % en novembre 2022, soit deux fois plus que l’année précédente. C’est l’une des régions les plus durement touchées par une conjonction de plusieurs facteurs d’inflation – les perturbations de la chaîne d’approvisionnement dues aux pandémies, la guerre en Ukraine et les contrecoups des politiques monétaires américaines visant à contenir l’inflation. Cette dernière a eu un impact négatif sur la valeur des devises dans toute l’Afrique par rapport au dollar américain – qui est la principale monnaie utilisée pour l’achat de denrées alimentaires sur les marchés internationaux et pour le remboursement de la dette. Cela a effectivement augmenté le prix des importations, aggravé la crise de la faim, et soulevé la question suivante : les dirigeants peuvent-ils apprendre des erreurs du passé ? Il semblerait que non.

Des caisses vides : L’insécurité alimentaire n’est pas la seule crise à laquelle les pays africains sont confrontés : beaucoup d’entre eux font aussi face à une crise de la dette. L’endettement de l’Afrique n’a jamais été aussi élevé depuis plus d’une décennie : 22 pays africains sont aujourd’hui en faillite ou présentent un risque élevé de surendettement. Et comme la hausse des taux d’intérêt mondiaux augmente le coût des emprunts en devises étrangères, les pays africains consacrent une part plus importante de leurs revenus au service de la dette, qui s’élèvera à 64 milliards de dollars en 2022. C’est presque le double de ce que l’Afrique reçoit en aide bilatérale. Il existe un écart notable entre les taux d’intérêt plus bas accordés aux pays du G7 et les taux d’intérêt plus élevés accordés aux pays à revenu faible. Cela peut expliquer pourquoi la dette moyenne des pays du G7 représente 136 % du PIB, alors que celle des pays d’Afrique subsaharienne est de 40 % du PIB, mais que seule la dette de ces derniers est considérée comme « élevée ». Des budgets en baisse risquent d’aggraver l’insécurité alimentaire, car les pays disposent de moins d’argent pour financer les importations et l’aide alimentaire.

La voie à suivre : Selon certaines estimations, le coût mondial de l’éradication de la faim se situe entre 39 et 50 milliards de dollars par an. Cela représente moins de la moitié des 110 milliards de dollars dépensés dans le monde pour l’alimentation animale. Pour mobiliser et diriger ces fonds là où ils sont le plus nécessaires, il faudra agir au niveau mondial et national :

  • À court terme, les pays devraient orienter l’aide alimentaire humanitaire, les subventions et les mesures de protection sociale vers les personnes les plus vulnérables et soutenir les pays qui n’ont pas la marge de manœuvre financière pour le faire.
  • Les pays doivent investir dans la production alimentaire afin de développer une souveraineté alimentaire.
  • Au niveau international, l’amélioration du cadre commun du G20 peut contribuer à apporter un soulagement et des liquidités supplémentaires aux pays endettés.
  • Enfin, une réforme des banques multilatérales de développement telles que la Banque mondiale – au sein desquelles les pays à revenu élevé ont une grande influence – pourrait libérer mille milliards de dollars de nouveaux capitaux afin d’alléger la pression fiscale sur les pays à revenu faible et intermédiaire.

L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION : 

  • Il est enfin là ! L’hymne à la solidarité de ONE France, co-composé par David Hallyday et Christophe Mali, du groupe Tryo, est enfin sorti. La chanson est interprétée par David Hallyday, Tryo, Cali, Isïa Marie, le duo 21 Juin, la rappeuse sénégalaise Black Queen, la journaliste TV Sarah Kaddour ainsi que les musicien·ne·s en exil du label Utopie (les Iraniens Tara Bakhtale et Mohsen Fazeli, ainsi que les Ouïghours Nasima Shavaeva, du Kasakhstan, et Azamat Abdurakhmanov, d’Ouzbékistan), porté par l’association Permis de vivre la Ville. À travers cet hymne, nous appelons collectivement à plus de solidarité face à la situation critique dans laquelle se trouvent les populations des pays à faible revenu. Regardez le clip ici !
  • Dans une tribune publiée dans l’Express, Najat Vallaud-Belkacem, directrice France de ONE, explique comment les banques multilatérales de développement pourraient prêter jusqu’à 1 000 milliards de dollars supplémentaires aux pays vulnérables, si elles utilisaient leur capital plus efficacement.
  • Nous faisons aujourd’hui face à la plus forte augmentation des inégalités mondiales depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans un billet de blog, nous mettons en avant 6 faits choquants sur ces inégalités.

LES CHIFFRES :

  • 65 % : Le pourcentage des terres arables restantes situées en Afrique.
  • 10 milliards de dollars : Le montant que la Banque africaine de développement s’est engagée à investir dans la sécurité et la souveraineté alimentaires de l’Afrique au cours des cinq prochaines années.

A suivre

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