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Pourquoi les idées reçues associées aux vaccins sont-elles mortelles ?

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Nous vivons actuellement une crise sanitaire planétaire. En effet, si le COVID-19 a démarré en Chine, force est de constater qu’il n’épargne plus aucun pays. Le virus gagne progressivement l’un des continents regroupant les pays les plus pauvres de la planète, à savoir l’Afrique. Si les pays africains ont tiré des leçons de la crise Ebola, survenue il y a quelques années, gardons toutefois à l’esprit que nous ne sommes pas tous égaux face à cette pandémie. Les pays les plus vulnérables seront ceux qui en pâtiront le plus, notamment par manque de structures sanitaires efficientes pour contrer le virus. Cette situation dramatique dans laquelle nous nous trouvons nous rappelle que les virus ne connaissent pas de frontières.

C’est pourquoi nous ne pouvons pas céder au repli national et laisser de côté les pays les plus pauvres. En ces temps difficiles, nous nous devons, d’une part, de faire preuve d’une solidarité infaillible, mais aussi de mettre l’accent sur les gestes qui sauvent, comme la vaccination. Les experts et expertes médicaux et scientifiques travaillent actuellement à la mise en place d’un vaccin capable de guérir le COVID-19. La Chine a d’ailleurs commencé à tester un vaccin sur une centaine de volontaires depuis le 17 mars. Si, au sein des pays développés, ce traitement est impatiemment attendu et perçu comme une solution miracle qui mettrait fin à cette crise sanitaire, rappelons que les vaccins ne sont pas acceptés dans toutes les régions du monde.

Pour la petite histoire

Nombreux sont ceux qui attribuent la découverte du vaccin à Louis Pasteur. Cependant, Edward Jenner est en réalité considéré comme le père de l’immunologie. En effet, en 1796, ce scientifique britannique est le premier à constater que les fermiers en contact avec des vaches atteintes de « vaccine » ne contractaient pas le virus de la « variole ». À la suite de cette observation, et pour confirmer son hypothèse, il inocule à James Phipps, âgé de 8 ans et atteint de variole, le pus de la vaccine. Trois mois plus tard, il lui injecte le virus de la variole, mais l’enfant ne développe pas la maladie. C’est ainsi qu’Edward Jenner prouve que la vaccine immunise les patients atteints de variole par formation d’anticorps propres à lutter contre l’infection.

Malgré cette découverte scientifique majeure, qui sera plus tard approfondie par Pasteur, beaucoup de personnes sont encore réticentes à la vaccination.

Quelques préjugés récurrents

  • Un poison créé par « l’homme blanc », héritier du passé colonial…

Les populations issues d’Afrique subsaharienne auraient tendance à croire que les vaccins, importés d’Occident, les rendraient plus malades qu’ils ne le sont déjà. Selon l’étudiant en 5ème année de médecine et stagiaire au sein des hôpitaux de Guinée, Aboubacar Sidiki Sangaré, cela est lié, d’une part, aux conséquences de la colonisation, et d’autre part, il affirme que, même si la situation est meilleure dans certaines régions, les gens restent majoritairement mal informés, d’où leur méfiance vis-à-vis des vaccins.

  • …qui permettrait d’exercer son contrôle sur la démographie africaine

Les vaccins seraient aussi à l’origine de la stérilisation des femmes. En effet, une croyance populaire selon laquelle les Occidentaux auraient pour objectif de diminuer les taux de natalité afin de contrôler la démographie africaine circulerait dans certains pays d’Afrique subsaharienne, comme la Guinée Conakry. C’est pourquoi les mères, principalement en charge de l’éducation de leurs enfants, ont tendance à faire vacciner leurs garçons plutôt que leurs filles, explique M. Sangaré.

  • La médecine traditionnelle, un remède privilégié

« Dans notre culture, on ne connaît pas la vaccination : tout ce qui est exogène à notre tradition est néfaste à notre survie ». Selon l’étudiant, certaines communautés, telles que les Soussous, favorisent l’indigénat : ils préfèrent se rendre au village pour trouver des plantes médicinales qui leur permettraient de guérir leur pathologie. Cependant, explique M. Sangaré, la plupart de ces personnes finissent par envisager l’hôpital comme dernier recours lorsque leur état s’aggrave.

D’où viennent ces préjugés et cette réticence à la vaccination ?

« La rencontre singulière entre les agents de santé et les membres de la communauté est le point de départ de la construction de la confiance que développent les utilisateurs des services de santé en leur système de santé »

– Drissa Sia, chercheur postdoctoral en santé publique au sein de l’Institute for Health and Social Policy de l’université McGill à Montréal.

Le chercheur Drissa Sia explique dans 30 idées reçues en santé mondiale que, au sein des pays à faible revenu, l’analphabétisme touche une grande partie de la population. Selon les professionnels de santé de ces pays, cela pourrait participer à un mauvais état de santé. « Les populations analphabètes ignorent l’importance des vaccins pour leurs enfants, si bien qu’elles refusent de les faire vacciner ». Construire une relation de confiance entre les soignants et les patients serait donc la condition sine qua non qui permettrait d’éradiquer le scepticisme existant à l’encontre de la vaccination. Des solutions sont déjà mises en place dans plusieurs pays : certains agents de santé s’organisent pour pouvoir se déplacer dans les zones géographiques les plus reculées afin d’accéder aux populations les plus enclavées.

De plus, la multiplication des programmes de sensibilisation à destination des populations vivant en zone rurale pourrait créer un lien de confiance entre ces derniers et leur système de santé. Cependant, le chercheur Drissa Sia met en garde les centres de santé contre l’infantilisation de leurs patients, au risque que ces derniers soient plus réticents aux recommandations médicales et refusent les traitements préconisés.

Conséquences de la non-vaccination

Nous ne sommes pas tous égaux face à la non-vaccination. En France, si les parents qui refusent de faire vacciner leurs enfants encourent, entre autres, le risque de ne pas pouvoir inscrire ces derniers en collectivité, il faut savoir que, dans les pays les plus pauvres, le risque encouru est mortel. En effet, en 2019, l’OMS a déclaré que le scepticisme à l’égard de la vaccination était l’une des 10 menaces les plus importantes à la santé mondiale. L’hésitation à l’égard des vaccins pourrait mettre en péril tous les efforts réalisés envers l’éradication de certaines maladies. Face au scepticisme concernant la vaccination, certaines maladies mortelles ont refait surface ces dernières années. Par exemple, les cas de rougeole dans le monde ont augmenté de 30%.

De plus, rappelons que l’importance et l’efficacité des vaccins se sont avérées à plusieurs reprises. En effet, lors de la crise Ebola, Gavi, l’Alliance du vaccin, a engagé un montant de 5 millions de dollars pour financer l’achat d’un vaccin expérimental validé et recommandé par l’OMS pour lutter contre la maladie. Ces vaccins ont ensuite été mis à la disposition des populations en RDC durant l’épidémie de 2019 et sont reconnus pour avoir contribué à empêcher la propagation du virus.

Bien qu’il n’existe pas encore de vaccin pour le COVID-19, Gavi pourrait jouer un rôle essentiel en veillant à ce qu’un futur vaccin soit mis à la disposition des populations pauvres et vulnérables.

C’est pourquoi il est important que les mentalités évoluent sur les préjugés car, si on se vaccine d’abord pour soi, on se vaccine aussi pour protéger les autres.

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