Avant de prendre la direction de la plage, n’oubliez pas ceci : du 13 au 16 juillet, les dirigeants du monde entier réunis à Addis-Abeba, en Éthiopie, auront une formidable occasion de réexaminer comment assurer la croissance des pays en développement. Une occasion à ne pas manquer !
Les trois journées de la Conférence des Nations unies sur le financement du développement seront déterminantes pour l’avenir des pays les plus pauvres. Car ces « pays les moins avancés » sont depuis quelques années exsangues. La part déjà minime de l’aide internationale en leur faveur a en effet diminué de 6 % depuis 2010.
Pourtant, ce sont ces pays qui ont le plus besoin de cette aide internationale pour développer et renforcer des systèmes de santé et d’éducation décents et favoriser les investissements dans l’agriculture et les infrastructures. La conférence d’Addis-Abeba ne sera un succès que si les pays riches acceptent d’allouer davantage de ressources en faveur des plus pauvres.
Pourtant, lors de cette conférence, il ne sera pas uniquement question de financement, même si cet aspect n’en demeure pas moins important pour les plus riches des pays pauvres – ceux qui sont en voie de rejoindre la catégorie des pays à revenu intermédiaire. En effet, pour ces pays, une aide digne de ce nom passe aussi par des réformes axées sur la lutte contre la corruption. Des réformes permettant de lutter contre l’ampleur de la fuite illicite de capitaux originaires des pays pauvres vers les îles gorgées de soleil des Caraïbes ou les cabinets d’avocats londoniens. Car ces fonds pourraient servir à améliorer le niveau de vie des populations les plus vulnérables plutôt qu’aider à la construction de villas dans le sud de la France.
Lors de cette conférence, les dirigeants devront adopter des mesures en fonction des besoins des pays, qui sont bien différents les uns des autres. Pour mieux comprendre, prenons l’exemple de la Tanzanie et du Nigeria.
Ces deux pays d’Afrique bénéficient aujourd’hui d’une croissance économique soutenue. En revanche, les défis diffèrent en fonction du type de croissance qu’ils connaissent et du montant d’aide au développement qu’ils reçoivent.
Au Nigeria, la première puissance économique d’Afrique, l’aide publique au développement ne constitue qu’une partie relativement peu importante de l’ensemble des ressources – à peine 0,4 % du produit national brut. Le pays dispose d’importantes ressources pétrolières, qui représentent trois quart des recettes totales du gouvernement.
Néanmoins, les recettes fiscales du Nigeria sont relativement faibles par rapport à l’ampleur de son économie. Le revenu du gouvernement central représente environ 5 % du PIB, contre 12,9 % en 2008. Les richesses tirées des ressources naturelles du Nigeria ne se sont pas encore traduites par une amélioration des conditions de vie de ses citoyens. En témoigne le taux élevé d’extrême pauvreté, un phénomène qui touche encore 62 % de la population, exactement comme il y a vingt ans.
Que réserve donc la conférence d’Addis-Abeba au Nigeria ? Tout d’abord, comme d’autres pays en développement, le Nigeria doit s’engager à conclure un nouveau pacte avec ses citoyens. Le gouvernement doit améliorer la collecte des impôts et affecter davantage de ressources aux services essentiels, comme la santé, l’éducation et la nutrition. Aujourd’hui, seulement 64 % des enfants en âge d’aller à l’école primaire sont scolarisés et un quart des décès d’enfants en Afrique ont lieu dans ce pays.
Mais le Nigeria doit aussi endiguer la corruption. La conférence d’Addis-Abeba peut l’y aider en soutenant les accords internationaux de lutte contre l’évasion illicite de capitaux. Elle pourrait aussi imposer aux sociétés pétrolières, gazières et minières de payer leur dû au gouvernement et de faire preuve de transparence quant aux versements effectués.
Autre pays, autre problème. La Tanzanie est largement tributaire de l’aide au développement, qui représente 9 % de son PIB. Si ses recettes fiscales représentent 17 % du PIB, elles restent extrêmement limitées, et le pays ne peut affecter que des montants dérisoires au bien-être de ses habitants.
La Tanzanie a fait d’énormes progrès. Depuis 1992, le nombre d’habitants vivant dans la pauvreté a diminué de près de 40 % et le taux de scolarisation est passé de 51 à 83 % au cours de la même période. Mais à court terme, le pays a encore besoin de l’aide au développement pour répondre aux besoins de base de ses habitants. L’exemple de la Tanzanie illustre très bien la nécessité pour les pays les plus riches de donner la priorité aux plus pauvres en allouant 50% de l’aide au développement aux pays les moins avancés
Lors de la réunion d’Addis-Abeba, tout le défi sera de prêter attention à ces deux catégories de pays en développement, dont les besoins sont très différents. À cette occasion, les dirigeants doivent faire preuve de leadership et réfléchir ensemble à la façon de convaincre les pays riches et pauvres à passer à l’action. Les plus pauvres doivent accepter de mobiliser davantage de recettes publiques et de fonds privés au service de leur développement. Quant aux nations favorisées, elles doivent accepter de revoir à la hausse leur aide publique au développement – et d’en allouer la moitié aux pays qui en ont le plus besoin.
Un accord sur ces points offrirait à des centaines de millions de personnes la chance de mener une vie meilleure, plus prospère et en bonne santé.
Une nouvelle qu’on se réjouirait de lire à la plage, non ?
Cette tribune a été traduite de l’anglais et initialement publiée sur Reuters.