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L’Afrique face à une catastrophe sans vaccins alors qu’au Canada des doses sont gaspillées

ONE

Nous avons plus qu’assez de vaccins, d’autres non.

L’Afrique est confrontée à une crise de la COVID-19, les cas se multiplient et le continent se dirige vers une catastrophe. Au cours du dernier mois les décès dus à la COVID en Afrique ont augmenté de 80%. Seulement 3% des Africains ont reçu leur première dose, et le continent est en voie de rater la cible de 10% de sa population vaccinée d’ici la fin de l’année. Bruce Aylward de l’OMS a déclaré que cela devrait être «une cicatrice sur toutes nos consciences».

Pendant ce temps, au Canada, le premier ministre Trudeau a annoncé le 27 juillet qu’avec 66 millions de doses reçues, nous en avons assez pour vacciner complètement tous les Canadiens éligibles. Nous avons maintenant atteint un point où l’offre de vaccin dépasse la demande, et déjà des doses d’Astra Zeneca ont été jetées et des vaccins Moderna s’empilent dans les congélateurs en approchant leur date de péremption.

Le Canada est le pays qui a commandé le plus de vaccins par personne : en comptant les options d’achats, de quoi vacciner chaque Canadien 5 fois. À moins que les doses excédentaires ne soient partagées dès maintenant, nous pourrions finir par jeter des millions de doses alors que la plupart du reste du monde n’est pas vacciné. C’est un scandale que nous ne pouvons pas laisser se produire.

Figure 1: Il n’y a plus une, mais deux pandémies

Le Canada est en très bonne position, mais certains pays africains constatent une augmentation des cas alors qu’une très faible portion de leur population est vaccinée.

Le Canada s’est jusqu’ici engagé à partager 30,7 millions de doses avec COVAX, le mécanisme mondial de distribution de vaccins, y compris un récent engagement à faire don du reste de nos commandes d’Astra Zeneca. Mais il n’y a eu aucune confirmation du moment où ces vaccins donnés pourraient atteindre les pays qui en ont besoin.

De plus, une nouvelle analyse de la campagne ONE basée sur les données de la société d’analyse Airfinity montre qu’au rythme actuel, le Canada se retrouvera avec entre 16 et 42 millions de vaccins excédentaires qui risquent de s’accumuler dans les congélateurs ou être jetés d’ici Noël, alors que la pandémie continue de faire rage en Afrique et dans le monde en développement.

Nous avons non seulement l’obligation morale de partager plus de doses, mais il est dans notre propre intérêt d’arrêter la propagation au niveau mondial et l’émergence de nouveaux variants. Sinon, davantage de décès évitables se produiront et la relance au Canada sera elle-même menacée par une économie mondiale chancelante. Selon le FMI, si on ne réussit pas à aider les pays en en développement à vaincre la COVID-19, il pourrait en coûter 4 500 milliards de dollars à l’économie mondiale.

Il faut donner plus de doses. Des vies en dépendent.

L’Afrique traverse une crise de la COVID de plus en plus urgente et à besoin d’au moins 200 millions de doses de vaccin d’ ici la fin septembre pour ralentir la propagation et éviter d’autres décès évitables. Le Canada devrait immédiatement transférer toutes les nouvelles commandes de vaccins à COVAX, au-delà de s’assurer qu’il y en a suffisamment pour que tous les Canadiens soient complètement vaccinés. Cela signifie au moins 12 millions de doses supplémentaires partagées avant la fin septembre, et au total 16 à 42 millions de vaccins donnés avant la fin de l’année. Il faut agir en urgence si nous voulons mettre fin à la pandémie et éviter un gaspillage inimaginable.

Le gaspillage de vaccins n’est pas une préoccupation théorique. En plus des 300 000 doses de Johnson et Johnson qui ont été rejetées en raison d’un problème de fabrication, des milliers de doses d’Astra Zeneca ont déjà été gaspillées au Canada parce qu’elles n’ont pu être utilisées avant leur date de péremption. Étant donné que ce vaccin n’est pratiquement plus utilisé ici, il pourrait y en avoir des milliers d’autres dans les congélateurs ou à la poubelle. Combien de doses d’Astra Zeneca ont déjà été jetées au Québec? Qu’arrivera-t’il des doses dont nous n’aurons pas besoin? La même chose commence à se produire avec Moderna, avec des pharmaciens incapables d’injecter une partie des doses qu’ils ont en leur possession.

Il peut être tentant pour le gouvernement de conserver des stocks de vaccins au cas où des doses de rappel seraient nécessaires. Mais les preuves à ce jour sur la nécessité de rappels sont loin d’être concluantes, et de nombreux experts ont averti qu’il serait contre-productif de commencer à administrer des troisièmes doses à des personnes en bonne santé dans les pays riches alors que les populations à risque n’ont pas encore reçu leur première injection dans les pays en développement. Stocker un produit avec une courte durée de conservation entraînera inévitablement beaucoup de gaspillage. De toute façon, le Canada a déjà commandé jusqu’à 60 millions de doses supplémentaires de Pfizer par an pendant les 3 prochaines années au cas où des doses de rappel seraient nécessaires.

Les doses excédentaires que nous recevrons au cours des 5 prochains mois doivent être partagées de toute urgence avec les pays qui en ont. Les variants qui se développent ailleurs dans le monde constituent une menace pour les Canadiens. Plus nous attendrons pour vacciner le reste du monde, plus de nouveaux variants émergeront, et plus ce cercle vicieux se poursuivra. Le moment est venu de donner plus de doses. Des vies en dépendent.

Jusqu’à 42 millions de doses pourraient ne pas être utilisées au Canada d’ici Noël

Selon les projections de Airfinity, d’ici décembre 2021 le Canada aura reçu au moins 92 millions de doses des quatre vaccins actuellement approuvés par Santé Canada (Moderna, Pfizer, Astra Zeneca et J& J). Si Medicago et Novavax sont également approuvés, l’offre totale pourrait passer à 117 millions de doses.

Pour vacciner complètement tous les Canadiens, y compris les enfants de moins de 12 ans si les vaccins sont approuvés pour eux , 76 millions de doses seront nécessaires au total. Il s’agit de projections très optimistes de la réelle demande, car il est peu probable que 100 % de la population veuille se faire vacciner.

Cela signifie qu’entre 16 et 42 millions de vaccins excédentaires risquent d’être stockés ou gaspillés au Canada d’ici la fin de l’année. Le scénario le plus élevé signifie que nos vaccins excédentaires seraient suffisants pour vacciner complètement tout le monde dans un pays comme le Burkina Faso cette année. À l’heure actuelle, 0,01 % des personnes sont complètement vaccinées au Burkina Faso.

Figure 2: Les stocks s’accumulent

Même en tenant compte des dons déjà annoncés, le Canada aura des millions de vaccins excédentaires